Fukushima, avril 2016

1er avril

  • Japon : premier jour de la libéralisation du marché de l’électricité. Il y a 260 compagnies dans le pays et la guerre des prix a été déclarée. Des compagnies proposent des couplages de prix avec d’autres services (téléphonie, gaz… et même voyages). Les anciennes compagnies se trouvent pénalisées, car elles doivent entretenir leurs centrales nucléaires à l’arrêt ! Les nouvelles compagnies n’ont pas de centrales nucléaires.
  • Japon : 174 travailleurs qui étaient intervenus entre le 11 mars 2011 et le 1er avril 2011, au début de l’accident, vont pouvoir revenir sur le site après cinq ans d’attente. Ils avaient cumulé au cours des seuls 20 premiers jours la limite à respecter sur cinq ans. Parmi eux, 150 sont des salariés de TEPCO qui entre-temps sont allés travailler dans des secteurs non radioactifs. TEPCO, qui manque de main-d’œuvre, espère les convaincre de reprendre le travail (et donc de la radioactivité), mais n’a pas de moyen légal pour les y obliger.
  • Japon : séisme de magnitude 6,1 au large de la préfecture de Mie (400 km à l’ouest de Tokyo).

4 avril

  • Chine-Japon : dans le journal en ligne xinhuanet.com , les autorités chinoises s’inquiètent de l’important stock de matières nucléaires inutilisées au Japon du fait de l’arrêt de nombreux réacteurs depuis l’accident de Fukushima. La Chine redoute des possibilités de dispersion ou de vol de matière fissile en cas de désorganisation suivant un important séisme.

6 avril

  • Japon : le tribunal de Fukuoka n’a pas donné raison à un groupe de citoyens qui avait porté plainte contre le redémarrage de deux réacteurs de Sendai, en pointant des irrégularités dans leurs mesures de sécurité. Les pronucléaires ont dû pousser un gros soupir… car si le tribunal s’était prononcé pour l’arrêt, le Japon se serait une nouvelle fois retrouvé avec tous ses réacteurs arrêtés !
  • Grande-Bretagne : Intergenerational Foundation, un club de réflexion britannique, publie une étude montrant qu’opter pour les renouvelables permettrait, à production équivalente, d’économiser 50 milliards d’euros par rapport au projet d’EPR français… Oui, mais le vent et l’éolien ne permettent pas de faire des bombes ! Et ça, manifestement, ça n’a pas de prix.
  • France : après la CGT et la CGC, FO-EDF demande à son tour le report du projet nucléaire d’Hinkley Point en Grande-Bretagne.
  • Afrique du Sud : le gouvernement devait en principe lancer au début du mois d’avril le processus de sélection pour le choix de constructeurs de nouveaux réacteurs nucléaires. La ministre de l’Energie, Tina Joematt-Pettersson, annonce qu’il est reporté à une date indéterminée. L’opposition se félicite de cette décision et rappelle que la grande majorité de la population est hostile à cette énergie trop coûteuse.

7 avril

  • Japon : selon un reportage de The Independent, les habitants ont peur de la contamination transmise par les sangliers qui prolifèrent dans la zone contaminée et mangent des plantes fortement contaminées. Les chasseurs en ont tué 13 000 en 2015 contre 3000 l’année précédente. Le problème est ensuite de savoir ce qu’on fait des sangliers : incinérés, ils libèrent un nuage radioactif et la solution a été abandonnée. Pour les enterrer, il faut de la place et surtout ensuite surveiller les lieux. Trois fosses pouvant contenir chacune 600 corps d’animaux ont été ouvertes sur la commune de Nihonmatsu, à 50 km de la centrale détruite, mais elles sont déjà pleines. Le gouvernement régional cherche des terrains publics pour ouvrir d’autres fosses.
  • Japon : un mur anti-séisme de 22 m de haut vient d’être terminé pour protéger les abords de la centrale de Hamaoka. Il fait 1,6 km de long et les travaux avaient commencé en novembre 2011. La centrale ne va pas pouvoir pour autant redémarrer, car entre temps, il a été démontré qu’elle est sur des failles actives.
  • Japon : les exploitants du nucléaire sont inquiets : les coûts de mises aux normes des réacteurs qui pourraient redémarrer (au moins 1 milliard d’euros par réacteur) et le coût encore inconnu des réacteurs définitivement arrêté et à démanteler rend l’électricité nucléaire peu compétitive maintenant que le marché est ouvert à la concurrence.
  • Japon : les dernières inspections de la centrale d’Ikata sont en cours. Si les résultats sont positifs, l’exploitant espère redémarrer le réacteur n° 3 en juillet 2016.
  • Japon : la cour d’appel de Fukuoka a rejeté les plaintes des citoyens demandant l’arrêt de la centrale de Sendai, estimant que ce n’est pas au tribunal de juger de la dangerosité du site. Les risques mis en avant par les citoyens ne sont pas contestés, mais le tribunal doit uniquement s’assurer de la conformité des décisions avec le cadre défini par les politiques. Les plaignants renoncent à saisir la Cour suprême.
  • Union européenne : un rapport estime que cela coûtera presque aussi cher de fermer et démanteler les réacteurs actuels (250 milliards d’euros) que de les remplacer (350 à 450 milliards d’euros).

8 avril

  • Japon : nouveau sondage auprès des personnes évacuées bénéficiant d’un logement gratuit : 65 % ne souhaitent pas revenir dans la province de Fukushima, 18 % souhaitent revenir, les autres hésitent.

9 avril

  • Japon : les autorités de la province de Chiba annoncent que 333 enfants sur 522 contrôlés dans la commune de Kashiwa (soit 63 % !) présentent des kystes anormaux au niveau de la thyroïde. La municipalité affirme, sans rire jaune, que cela ne prouve pas un lien avec la radioactivité.
  • Japon : alors que plusieurs centaines de cas de maladies de la thyroïde ont été diagnostiqués, 16 enfants présentent un cancer de la thyroïde agressif à évolution rapide et métastases… Cette information est communiquée par l’IPPNW, l’association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire, qui dénonce par ailleurs le manque d’études au Japon sur le suivi de la santé de la population suite aux retombées radioactives de Fukushima. En tenant compte des données communiquées (rappelons qu’une loi du secret interdit aux médecins japonais de communiquer sur le sujet), l’association internationale calcule que le nombre de cancers à attendre de l’accident devrait se trouver dans une fourchette entre 4300 et 16 800 cas. Mais l’IPPNW ne dispose que de données rendues publiques par des organisations pronucléaires et avertit que la réalité est sans doute pire.

10 avril

  • Japon : le gouvernement organise une réunion avec les habitants de la commune de Katsurao (1470 habitants avant l’accident) pour présenter le projet de lever l’ordre d’évacuation le 12 juin prochain, sauf pour une partie de la commune classée « retour difficile ». Le conseil municipal a donné son accord, même s’il relève le manque de commerces et la quasi-absence de services médicaux (bizarrement les médecins sont les plus réticents à venir habiter en zone contaminée !). Selon un questionnaire, 48 % des habitants souhaitent pouvoir revenir partiellement dans leur maison… mais seulement 8 % souhaitent y vivre en permanence (essentiellement les plus âgées).

11 avril

  • France : le Luxembourg propose de participer financièrement à la fermeture de la centrale de Cattenom. L’Allemagne refuse d’en faire autant, mais se dit intéressée pour réfléchir à l’implantation de nouvelles industries près de Fessenheim et Cattenom pour y transférer des emplois si les réacteurs ferment.

13 avril

  • Japon : le ministère de l’Environnement annonce que 90 % des sols contaminés seront recyclés. Les quelque 22 millions de m3 collectées pourraient être autorisés à servir dans la construction une fois que le taux de radioactivité est descendu en dessous de 8000 Bq/kg. Le Ministère affirme que la radioactivité peut être diminuée par la chaleur ! N’y a-t-il pas un physicien au Japon pour expliquer que la radioactivité ne se brûle pas ?

14 avril

  • France : la baisse du nucléaire de 75 % à 50 % de l’électricité est toujours maintenue pour 2025… mais les conditions pour le faire ne seront pas prises avant 2019 selon Ségolène Royal. Donc au prochain gouvernement de se démerder…
  • Japon : très fort tremblement de terre dans la province de Kumamoto (sud-ouest du pays), de magnitude 6,4 suivi une heure plus tard d’une réplique à 5,7, puis de nouveau 6,5, puis plus d’une centaine de répliques de moindre intensité. Plusieurs bâtiments de la ville de Mashiki se sont écroulés ou ont pris feu. Au moins 9 personnes sont mortes, 900 ont été hospitalisées et 44 000 personnes évacuées. Le séisme est moins violent qu’en 2011, mais du fait qu’il a eu lieu sous terre et non sous l’eau, il a été très fortement ressenti. L’épicentre se trouve à moins de 150 km de la centrale de Sendai, la seule en fonctionnement. La compagnie Kyushu Electric Power a assuré que la centrale fonctionnait normalement. Sans envisager de l’arrêter… alors que dans le même temps plusieurs usines de la région étaient mises à l’arrêt pour vérification.
  • France : EDF et Areva annoncent la mise en œuvre de nouveaux tests sur la cuve de l’EPR de Flamanville, les premiers tests ayant révélé des anomalies plus importantes que prévu. Si cela a comme conséquence de devoir changer l’actuelle cuve installée dans le bâtiment réacteur qui a été refermé, cela impliquerait plusieurs années de retard supplémentaire. Pour mémoire, en 2007, Nicolas Sarkozy avait promis d’inaugurer le réacteur avant la fin de son quinquennat en 2012 !
  • Japon : un couple a acheté — sans doute pas cher — un terrain décontaminé pour construire une maison. Ils avaient cru les explications officielles. Surprise !, en creusant les fondations, ils sont tombés sur des sacs de déchets enterrés. Une décontamination donc très partielle…
  • France : suite à la chute d’un générateur de vapeur à la centrale de Paluel, l’ASN, autorité de sûreté nucléaire, a demandé à EDF de lui transmettre les vidéos de surveillance. EDF a répondu que malheureusement l’accident n’a pas été filmé. Un gros mensonge vite éventé puisque les élus Verts de la région ont pu se les procurer et les mettre en ligne sur internet.

16 avril

  • Japon : nouveau séisme de magnitude 7,3 à 1 h 25 heure locale, à seulement 110 km de la centrale nucléaire de Sendai, la seule en fonctionnement dans le pays. Ce nouveau séisme provoque l’arrêt des liaisons téléphoniques dans toute la région, une quarantaine de morts, plus de 2000 personnes hospitalisées et de très nombreux écroulements de maisons et immeubles (environ 180 000 personnes à reloger), de nombreuses routes coupées. Le Shinkansen, le train rapide japonais, a arrêté de circuler dans la région depuis le premier séisme du 14 avril. Des pans de montagne menaçant de s’effondrer, 170 000 personnes ont été évacuées. Les responsables de la centrale se veulent rassurants. Le Ministère de l’Environnement explique qu’un réacteur doit être arrêté s’il subit une accélération supérieure à 620 gal (vitesse de déplacement du sol). Elle n’aurait pas dépassé 12,6 sur le site de Sendai. Des milliers de personnes protestent sur les réseaux sociaux et sont relayées par les médias : le risque est que ces tremblements de terre ne soient qu’annonciateurs d’un séisme plus important.
  • Japon : de retour de voyage dans la région de Fukushima, Arnie Gundersen, expert nucléaire américain, dénonce les pressions officielles qui empêchent les médecins de parler. Il rapporte des cas de pieds devenus noirs (mauvaise circulation du sang), de cheveux tombés, de furoncles, de sang dans les poumons… qui sont autant de signes d’une contamination radioactive. Il a entendu des rumeurs de hausse de mortalité chez les enfants, mais n’a aucun moyen de le vérifier. Il rappelle que 60 millions de Japonais vivent en zone contaminée.

17 avril

  • Japon : 410 séismes en trois jours, dont 162 de magnitude supérieure à 3,5. Selon l’Agence météorologique japonaise, c’est le plus grand nombre jamais enregistré. L’Agence pense que le séisme du 16 avril est la secousse principale. 745 000 foyers sont privés d’électricité, plus de 100 000 de gaz, l’eau manque un peu partout, 25 000 membres des forces d’autodéfense sont mobilisés.

18 avril

  • Japon : on en est à 531 séismes en quatre jours. Le débat autour de la centrale de Sendai fait rage : ces secousses peuvent-elles s’étendre à d’autres failles, dont celles toutes proches qui passent à proximité de la seule centrale en activité ? La NRA a fait une conférence de presse. L’autorité de sûreté nucléaire estime que l’on est loin des limites nécessitant l’arrêt des réacteurs. Elle ne peut pas tenir un autre discours puisque les deux réacteurs de Sendai sont parmi les cinq sur lesquels des travaux de mise en conformité, avec les nouvelles règles post-Fukushima, ont été réalisés. Dire qu’il faut arrêter ces réacteurs signifierait que les nouveaux règlements mis au point par la même NRA n’étaient pas assez contraignants. Ce qui est sûr, c’est que la désorganisation observée alors que seulement 170 000 personnes ont dû être prises en charge démontre qu’en cas d’accident nucléaire grave, les plans d’évacuation d’urgence ne sont pas réalistes. Autre inquiétude : il y a trois autres centrales nucléaires dans la région (Genkai, 100 km au nord-ouest, Ikata, 160 km à l’est, Shimane, 500 km au nord-est). Si elles sont à l’arrêt, elles disposent de piscines remplies de combustibles nucléaires, piscines susceptibles de s’effondrer en cas de trop fortes secousses. Si ces piscines se vident, c’est la catastrophe assurée.
  • Japon : dans un entretien télévisé, une infirmière de la région de Fukushima raconte que de nombreuses femmes se font avorter de peur d’avoir un enfant malformé. Elle signale également une augmentation des enfants mort-nés.
  • France : EDF présente ses comptes 2015. Sa dette a augmenté de 10 % en un an. L’Etat a racheté pour 1,8 milliard d’euros d’actions. EDF souhaite une augmentation des tarifs toujours fixés par l’Etat… ce qui pourrait accélérer le départ des clients professionnels (déjà 30 % sont partis vers d’autres fournisseurs).
  • France : l’ASN, autorité de sûreté nucléaire, reconnaît avoir été informée de la falsification de rapports de contrôle dans une entreprise de mécanique française (SBS à Boën dans la Loire) qui fournit l’industrie nucléaire. L’ASN indique que cela concerne notamment une soixantaine de pièces dont certaines destinées au réacteur de recherche Jules Horowitz actuellement en construction sur le site de Cadarache (Bouches-du-Rhône).

19 avril

  • Japon : une pétition demandant l’arrêt de la centrale de Sendai a été lancée par des journalistes, écrivains et photographes. Elle a réuni plus de 30 000 signatures en trois jours.
  • Japon : inquiétude dans les milieux financiers, l’action de la compagnie Kyushu Electric, exploitant la centrale de Sendai, baisse de 7,6 % en une journée.
  • Chine : le gouvernement ne croit plus à la rentabilité du nucléaire. L’objectif 2020 avant l’accident de Fukushima était de 130 GW, il a été révisé en 2011 à 70 GW. Il vient d’être revu à 58 GW (une cinquantaine de réacteurs). Il investit par contre maintenant massivement dans les énergies renouvelables puisqu’en 2015, celles-ci ont progressé de 47 GW (dont 31 dans l’éolien, 15 dans le solaire) pour déjà 200 GW installés. Les renouvelables dépassent donc déjà la production nucléaire, et contribuent à faire baisser le recours aux énergies fossiles.
  • Japon : le ministre de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie, ne s’encombre pas de sentiments. Il déclare à la presse que « jeter le tritium radioactif à la mer est la solution la moins chère et la plus rapide ». Cette déclaration intervient après un rapport qui lui a été remis par un panel de scientifiques pour trouver des solutions concernant les 800 000 tonnes d’eau radioactive actuellement stockées sur le site de Fukushima (+ 400 tonnes par jour). La deuxième solution la moins coûteuse consisterait à stocker cette eau pendant au moins 75 ans sur place dans des réservoirs souterrains, en attendant que la radioactivité décroisse naturellement. Selon le ministère, rejeter 800 000 tonnes en mer pourrait prendre 7 à 8 ans, le temps de diluer pour éviter de trop fortes concentrations de radioactivité. Seul détail qu’a oublié le ministre, en 7 ans, si l’on n’arrive pas à arrêter la réaction nucléaire, il se sera accumulé de nouveau 400 tonnes x 365 x 7 = 1 022 000 tonnes !

20 avril

  • Japon : la NRA, autorité de sûreté nucléaire, juge conforme aux nouvelles normes le projet de restauration des réacteurs 1 et 2 de Takahama, lesquels bénéficient d’une dérogation pour avoir déjà dépassé 40 ans. A en croire les médias français, ces nouveaux réacteurs vont donc pouvoir redémarrer. Il n’en est rien : pour avoir le feu vert, les exploitants vont devoir remplacer 60 % des câbles électriques inflammables et mettre une enveloppe de protection sur les 40 % restant. Comme il y a 1300 km de câbles, cela va prendre un certain temps (3 ans selon l’exploitant). Greenpeace a annoncé un recours en justice contre cette décision, car la norme c’est de remplacer tous les câbles. Une fois les câbles refaits ou isolés, la NRA devra encore faire de multiples contrôles, et ceci d’autant plus que, dans trois ans, les réacteurs seront à l’arrêt depuis 8 ans !
  • France : la situation devient dramatique pour la filière nucléaire : Areva en situation de faillite, EDF qui n’a pas les moyens de faire la mise à niveau de ses réacteurs (100 milliards d’euros). Une réunion de crise se tient ce jour à l’Elysée. Ses résultats sont tenus « secrets ». Où est le discours sur la transparence ? Il a quand même fuité que le PDG d’EDF a demandé une aide financière à l’Etat et que le Ministère de l’Economie a répondu qu’en renonçant à ses dividendes, l’Etat avait déjà fait un cadeau de 1,8 milliard en 2015… ce qui manifestement ne suffit pas.

21 avril

  • France : selon un sondage réalisé pour 20 minutes , 30 % des sondés estiment qu’un accident aussi grave que Tchernobyl « est tout à fait possible » en France, 40 % « plutôt possible »… et seulement 3 % « tout à fait impossible ». Le risque terroriste arrive en tête des causes possibles (34 %) juste devant la vétusté des installations (33 %), une catastrophe naturelle (11,2 %) et une erreur humaine (10,3 %).
  • France : le site journaldelenergie.com qui a publié des documents internes d’EDF montrant la vétusté des systèmes de secours reçoit une lettre recommandée d’EDF le sommant de retirer ces documents de son site. Le site répond en remerciant les lanceurs d’alerte qui au sein d’EDF ont le courage de sortir des informations cruciales pour le public. Le Réseau Sortir du nucléaire lance un appel à diffusion : les documents ont été téléchargés plus de 20 000 fois en quatre jours.

22 avril

  • Japon : Toshiba, fabricant de matériel électronique, a été pris dans un scandale financier. La compagnie avait masqué dans sa comptabilité les pertes provoquées par le ralentissement de la demande dans le secteur nucléaire aux Etats-Unis après l’accident de Fukushima. En 2015, la firme rectifie ses comptes en y portant une perte de 2,4 milliards d’euros.
  • France : le gouvernement annonce une aide de 3 milliards d’euros pour sauver EDF… en plus de l’abandon de ses dividendes de 1,8 milliard. L’obstination nucléaire commence à coûter très cher. EDF va vendre ses centrales thermiques à l’étranger et espère récupérer ainsi 10 milliards. La décision sur les EPR britanniques de Hinkley Point est reportée.

23 avril

  • France : un sondage indique que 47 % des Français sont pour l’arrêt du nucléaire, 53 % seraient pour. Mais le sondage montre une opposition entre générations : 57 % des 25 à 49 ans sont pour l’arrêt du nucléaire… alors que 58 % des plus de 50 ans et 66 % des plus de 64 ans sont pour continuer. Ceux qui sont pour sortir du nucléaire mettent en avant l’impossibilité de traitement des déchets nucléaires et le risque d’accident. Ceux qui sont pour continuer mettent en avant l’indépendance nationale et le coût avantageux ! Rappelons que 100 % du combustible des centrales vient de l’étranger et que le coût est tellement avantageux qu’EDF est quasiment en faillite.
  • Japon : alors que les médias internationaux n’en parlent plus, les séismes se poursuivent : on est à 830 en neuf jours sur une longueur de faille de plus de 100 km (alors que la moyenne annuelle est de 800 séismes). Nous en sommes à plus de 10 000 maisons détruites. 80 à 90 000 personnes dorment dans les abris d’urgence, dans les voitures ou campent sur les parkings. Des personnes qui dorment dans leur voiture restent trop longtemps immobiles et sans boire. Conséquence : des caillots de sang se forment et provoquent des embolies. Une vingtaine de personnes ont déjà été hospitalisées dont 4 graves. Une femme de 51 ans en est morte. Nous en sommes à 60 morts depuis le 14 avril. Il y a eu au moins 17 maisons pillées. Les sondes qui surveillent le volcan Aso, dans la zone du séisme, sont tombées en panne à la suite de coupures d’électricité. Les opposants au nucléaire soulignent la désorganisation sociale de la région et mettent en cause la réalité des plans d’évacuation en cas d’accident nucléaire. NHK et d’autres chaines de télévision refusent d’aborder ce sujet, estimant que ce n’est pas le moment de créer des angoisses supplémentaires.
  • Japon : David Kaye, rapporteur spécial de l’ONU pour les droits de l’homme a estimé que la liberté de la presse est menacée au Japon. Après une semaine d’enquête sur place, il s’étonne des obstacles que rencontrent les journalistes pour mener des enquêtes en particulier dans le domaine nucléaire. Il considère comme illégale la loi sur le secret votée en 2013 et qui bloque des informations cruciales sur le nucléaire ou la gestion des catastrophes. Reporters sans frontières a relayé ces craintes en dénonçant aussi cette loi du secret qui interdit de parler librement de la défense du Japon, de la famille impériale, du traité de commerce transatlantique et du nucléaire.

24 avril

  • Belgique : l’Allemagne conteste l’autorisation donnée pour le redémarrage des réacteurs présentant des micro-fissures (Doel 3 et Tihange 2). Elle estime que l’on ne peut pas seulement se contenter de calculs, mais qu’il faut être en capacité de faire des tests. Le Luxembourg se joint à la demande.
  • France-Allemagne : plusieurs manifestations se sont tenues sur les ponts entre l’Alsace et l’Allemagne réunissant au total entre 4000 et 5000 personnes dont une grande majorité d’Allemands.

25 avril

  • Belgique : le parti écologiste flamand Groen annonce disposer d’un audit interne de l’AFCN, l’autorité de sûreté nucléaire, qui montre comment des décisions sont prises sous la pression croissante des politiques. Il demande un débat parlementaire sur le sujet.
  • France : conférence de presse de Pierre-Franck Chevet, président de l’Autorité de sûreté nucléaire : « En France, nous pouvons avoir des séismes ou des inondations supérieurs à ceux qui étaient prévus, des actes de malveillance contre une centrale… Penser que cela n’arrive qu’aux autres revient à ne pas tirer les conséquences d’un accident. Le Japon s’est fait surprendre. Gardons à l’esprit que nous pouvons aussi nous faire surprendre. » Et de se préparer au pire : « »Si vous tracez un cercle de 100 kilomètres de rayon autour des centrales nucléaires d’Europe, vous constatez que, pour beaucoup d’entre elles, plusieurs pays sont concernés. Cela nécessite de nous coordonner et d’adopter des règles communes de protection des populations, ce qui n’est pas encore le cas« . Et d’être très réticent sur la prolongation de la durée de vie de nos réacteurs : »La question est de savoir, en particulier pour les réacteurs, s’ils peuvent être prolongés, avec des normes de sûreté rehaussées. Pour y répondre, un très gros travail d’analyse doit d’abord être mené. Les travaux d’amélioration des installations nécessitent un investissement industriel considérable et un contrôle renforcé de l’ASN« . Or il constate que nous avons un problème nouveau : »les graves difficultés économiques, financières et budgétaires des acteurs industriels du nucléaire".
  • France : François Hollande annonce qu’EDF devra indiquer les centrales nucléaires à prolonger ou à fermer d’ici… 2018 ! C’est-à-dire que l’on décidera si l’on peut prolonger un réacteur de 30 à 40 ans… alors que Fessenheim aura déjà 41 ans !

26 avril

  • France : pour le 30e anniversaire de l’accident de Tchernobyl, l’ACRO, association pour le contrôle de la radioactivité, publie les résultats portant sur 364 échantillons analysés dont 103 en France. Alors qu’en trente ans, elle a diminué théoriquement de moitié, la contamination en césium-137 est toujours présente, avec un record de 68 000 Bq/kg à Jausiers (Alpes-de-Haute-Provence). Les Alpes françaises à proximité de la frontière italienne restent très contaminées. Des aliments ont été trouvés dans le commerce avec jusqu’à 4410 Bq/kg (pieds-de-mouton en provenance du Luxembourg)… alors que la limite légale est de 600 Bq/kg. Les champignons restent dangereux (jusqu’à 860 Bq/kg mesurés dans la Drôme). Résultats sur le site http://tchernobyl30.eu.org/
  • Ukraine : le mystère reste entier sur le nombre de victimes (sans doute plus d’un million de morts et six à sept millions de malades). Personne ne sait ce que sont devenus les 800 à 900 000 liquidateurs venus à l’époque de toute l’URSS (au moins 112 000 morts en 2004). Plus de 3,5 millions de personnes vivent dans zones hautement contaminées en Ukraine, 2 millions en Bélarus, 2,7 millions en Russie. Les taux de césium-137 n’ont pas baissé comme attendu. Les enfants naissent très souvent avec des malformations, des maladies, des cancers… La radioactivité s’échappe toujours du réacteur et l’installation d’un nouveau sarcophage est sans cesse reportée du fait de la difficulté d’intervenir sur place.
  • France : il n’y a pas que Tchernobyl ! Lors de la réalisation d’une carte des retombées de Tchernobyl en France, la CRII-Rad a mis en évidence des pollutions radioactives persistantes provenant des essais nucléaires atmosphériques des années 1960. La Montagne noire, dans le sud du département du Tarn a été particulièrement contaminée et on y trouve des taux de radioactivité encore élevés… avec la présence d’américium 241, un élément qui indique une origine militaire.
  • Japon : nous en sommes à plus de 1000 séismes dans le sud-est du Japon. L’épicentre le plus proche de la centrale en activité de Sendai est pour le moment à 90 km des réacteurs. Le sismologue Katsuhiko Ishibashi estime que depuis le tremblement de terre de Kobe, en 1995, l’archipel du Japon est entré dans une période d’activité séismique rapide et il dénonce la « vulnérabilité fondamentale des centrales nucléaires ».
  • Ukraine : selon un article paru dans Libération , le coût de l’accident de Tchernobyl dépasse les 1000 milliards de dollars uniquement pour les trois pays les plus touchés, la Russie, l’Ukraine et le Bélarus. Par extrapolation, l’accident de Fukushima pourrait coûter encore plus cher, de l’ordre de 1500 milliards de dollars.
  • France : le périmètre d’évacuation en cas d’accident est officiellement étendu de 10 à 20 km. C’est 50 km en Suisse, 100 km en Allemagne. Mais monter à 30 km, cela signifierait pour la centrale de Bugey de prévoir l’évacuation de l’agglomération lyonnaise (1,5 million d’habitants), ce qui est totalement hors de moyens.
  • Suisse : le nuage de Tchernobyl pourrait être responsable, dans le pays, de 5000 cas de tumeurs de la thyroïde, dont 200 mortels.
  • Monde : selon Jean-Jacques Delfour, sur Médiapart, le secret-défense qui entoure la question nucléaire permet de minimiser les conséquences sanitaires des essais nucléaires, des accidents et des rejets continuels des réacteurs nucléaires. Maintenant que l’on sait que les maladies se développent même aux petites doses, la présence de particules radioactives dans l’air peut expliquer en partie la hausse importante de certaines maladies comme le cancer.

27 avril

  • Belgique : Le gouvernement annonce que la distribution des pastilles d’iode aux habitants va être étendue jusqu’à 100 km de réacteurs nucléaires. Après avoir vérifié ce que cela donnait sur une carte, il s’avère que tout le pays est à moins de 100 km d’un réacteur sauf la commune d’Antoing (à l’est de Lille) : 120 km de Gravelines (en France), 115 km de Chooz (en France), 120 km de Doel, 150 km de Tihange ! Le maire d’Antoing a quand même rappelé qu’en 1986, la commune a été contaminée par le nuage de la centrale de Tchernobyl situé à 2000 km !
  • Japon : un monument est inauguré à Tomioka à la mémoire des vaches victimes de la catastrophe nucléaire. Plusieurs milliers d’entre elles ont été abandonnées au moment de l’évacuation puis sont mortes de faim, ou ont été abattues, car trop radioactives.
  • Japon : dans un rapport alarmant remis aux autorités, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) s’inquiète de l’état des centrales nucléaires arrêtées maintenant depuis cinq ans. Plus le temps passe et plus le risque d’accident augmente, en phase de redémarrage ou d’arrêt définitif. La NRA (autorité de régulation nucléaire) explique qu’elle souhaite pouvoir inspecter les réacteurs à l’arrêt… mais cela n’est pas inscrit dans ses compétences actuelles. Même si une loi rectificative était adoptée, cela ne rendrait pas la mesure faisable avant 2020. L’AIEA s’inquiète aussi du niveau de compétences des inspecteurs de la NRA : ceux-ci ont reçu une formation initiale de deux semaines contre deux ans aux Etats-Unis. L’AIEA note que les inspecteurs japonais n’interviennent jamais à l’improviste, qu’ils peuvent visiter les centrales… mais pas se faire remettre les correspondances entre les dirigeants ou se plonger dans les rapports internes. Au Japon, une inspection dure en moyenne 168 heures contre 2000 heures aux Etats-Unis. L’AIEA avait fait sensiblement les mêmes critiques dans un précédent rapport en 2007… à l’époque, cela avait été largement ignoré par les autorités.
  • Japon : le bilan des séismes du mois d’avril montre la totale incohérence des plans de secours. A Kumamoto, ces plans prévoyaient la prise en charge de 35 000 personnes enregistrées comme ayant besoin d’une aide spécifique. 176 institutions devaient les prendre en charge. Cela n’a pas fonctionné pour la plupart : dans certains cas, les bâtiments avaient été détruits, dans d’autres, ce sont l’eau et/ou l’électricité qui étaient coupées, d’autres manquaient de personnels. Moins de 10 % des personnes concernées ont finalement été secourues correctement. Les médias sont très critiques : en cas de contamination radioactive provoquée par un séisme, la situation aurait sans doute été pire, car de nombreuses personnes de ces institutions n’auraient pensé qu’à s’enfuir.
  • Japon : la défaillance des plans de secours provoque des enquêtes. L’une d’entre elles rapporte que sur 140 centres d’accueil spécialisés en cas d’accident nucléaire, 106 ne disposent pas de stock de nourriture. C’est pour le moins bizarre puisque ces centres situés au-delà des périmètres de 30 km des réacteurs nucléaires ont reçu des financements pour assurer de 2 à 7 jours de nourriture. Ces centres sont prévus pour fonctionner avec des groupes électrogènes… mais dans 59 des centres, il n’y a pas de stocks de fuel pour les faire fonctionner ! Des interrogations ont surgi : les consignes en cas de séisme sont de sortir, en cas de nuage radioactif, de s’enfermer chez soi… alors que faire lorsqu’il y a les deux ?
  • Japon : la commune de Genkaï, dans la province de Saga, a connu une forte baisse de ses ressources depuis la fermeture définitive d’un des quatre réacteurs de la centrale nucléaire. Son maire annonce que pour compenser cela, il est prêt à accepter un site d’enfouissement des déchets… alors qu’il se trouve à 120 km de l’épicentre des séismes actuels.
  • Japon : la NRA se range à l’avis des experts qui avaient conclu que la faille sous le réacteur de Shika pouvait être active. L’exploitant conteste évidemment cette décision qui condamne le réacteur n° 2. Deux autres failles passant sous le réacteur n° 1 sont toujours à l’étude.
  • France : en 2015, 10 100 nouveaux cas de cancers de la thyroïde ont été diagnostiqués (à 75 % chez des femmes). Cela monte de 7 % par an. L’INVS, Institut national de veille sanitaire, estime que c’est le résultat d’un meilleur diagnostic… car cela augmentait déjà avant Tchernobyl. Du côté des malades, on a une autre interprétation : si cela montait avant Tchernobyl c’est parce qu’il y a eu des essais nucléaires atmosphériques et d’autres accidents nucléaires. Dans le département de l’Isère où existe un registre des cancers ancien, le nombre de cas a été multiplié par 8 en 20 ans (1986-2006).

28 avril

  • Belorus : scandale après l’analyse d’un fromage commercialisé en Russie, celui-ci contient 10 fois la limite de consommation en strontium-90. Cette pollution est toujours celle de Tchernobyl.
  • Japon : les parents de deux patients décédés lors de l’évacuation de l’hôpital de Futaba ont fait condamner TEPCO. La compagnie va devoir leur verser 250 000 €. Les parents demandaient le double, mais TEPCO a fait valoir qu’elle n’était pas la seule responsable des décès. Une cinquantaine des 338 personnes hospitalisées sont mortes dans les jours qui ont suivi l’évacuation de cet hôpital, le plus souvent par hypothermie.

29 avril

  • Pays-Bas : inquiètes des fissures dans les réacteurs belges, les autorités annoncent la commande de quinze millions de pilules d’iode pour une distribution à l’ensemble de la population adulte et aux touristes de passage, tout le monde étant à moins de 100 km des réacteurs belges ou de la seule centrale néerlandaise de Borssele.
  • France : Areva reconnaît que des anomalies ont été détectées sur son site du Creusot et que probablement des documents ont été falsifiés pour faire accepter des pièces litigieuses. C’est sur ce site qu’a été construite la cuve de l’EPR de Flamanville défectueuse.
  • France : Isabelle Kocher, nouvelle patronne d’Engie, première femme patronne du CAC40, annonce dans son premier discours que l’avenir est au solaire décentralisé et à la transition énergétique. Le groupe qui possède 7 réacteurs nucléaires en Belgique ne misera plus sur cette énergie.

30 avril

  • France : course de lenteur à Nancy, reprenant une action qui a eu lieu à Tokyo, le 31 mars 2011. A l’époque, les manifestants tournaient autour du siège de TEPCO. Ils ont été interrompus le 6 avril par la police ; ce qui pose la question de savoir s’il y a une vitesse minimale de déplacement pour les piétons. La lenteur représente le temps nécessaire à la disparition de la radioactivité… qui peut durer des millions d’années.