Chronique Agriculture OGM Santé

OGM : circuleront-ils incognito demain ?

Annick Bossu

Vous connaissez les OGM, mais connaissez-vous les « végétaux NTG » (nouvelles techniques génomiques) ? Pas de panique : c’est presque pareil ! La Commission Européenne cherche à les rendre commercialisables en Europe sans aucun étiquetage, évaluation ni étude de risques.

En 2018, la Cour de Justice de l’Union européenne a affirmé que tous les OGM obtenus par des nouvelles techniques de modification génétique sont des OGM soumis aux obligations d’évaluation des risques, d’étiquetage, de traçabilité et de suivi post-commercialisation. Depuis, les multinationales semencières n’ont de cesse de vouloir contrer cet arrêt.

Un tour de passe-passe pour faire « disparaître » les nouveaux OGM

Sensible à leurs arguments, la Commission européenne a publié en juillet 2023 une proposition qui vise à faire disparaître juridiquement la plupart de ces nouveaux OGM, appelés « végétaux NTG » (1). Le terme OGM serait-il trop explicite ?

Cette proposition basée sur des avis de l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (AESA) et des consultations biaisées, est truffée d’approximations et de mensonges présentés comme des vérités. Le plus conséquent de ces mensonges est de dire que certains de ces végétaux NTG seraient « équivalents » aux végétaux naturels ou issus de la sélection conventionnelle. L’équivalence (différente de l’identité) serait basée sur la seule comparaison de séquences d’ADN sur l’écran d’un ordinateur. Comme si une plante pouvait se réduire à une suite numérisée de lettres !

Des OGM sans étiquette ni suivi !

La Commission européenne est d’ailleurs en pleine contradiction : l’industrie qui dépose des brevets sur ces OGM met en avant des différences pour justifier leur caractère inventif, preuve que celles-ci existent ! Qu’à cela ne tienne, pour ces plantes, en fait très majoritaires, l’intégralité de la réglementation OGM serait écartée au profit d’une commercialisation sans entraves : finis l’évaluation préalable des risques, l’étiquetage, la traçabilité et le suivi. Les conséquences potentielles sont préoccupantes.

Les paysan·nes et les petit·es semenci·ères risqueraient de ne plus pouvoir produire leurs propres semences, n’ayant pas les moyens de prouver qu’elles contiennent naturellement une information génétique semblable à celle des semences brevetées. L’agriculture biologique serait elle aussi menacée, faute de mesures de protection contre les contaminations.

En absence d’étiquetage, tous les habitants de l’Union mangeraient des OGM sans le savoir… La Commission européenne estime que ces plantes étant équivalentes aux plantes traditionnelles, il n’y a pas lieu d’étudier leurs risques ! Les effets non intentionnels des manipulations génétiques sont occultés. Le principe de précaution, pierre angulaire de la réglementation OGM, n’est plus mentionné et ne sera plus appliqué.

La Commission habille son texte de promesses concernant ces « végétaux NGT » et introduit un concept de durabilité des plantes alors que seuls les systèmes agraires peuvent prétendre à la durabilité. Et cerise sur le gâteau : la Commission Européenne interdirait aux États d’interdire la culture de ces « nouveaux » OGM !

(1) NTG : Nouvelles techniques génomiques.

En partenariat avec : Inf’OGM, 38, rue Saint Sabin 75 011 Paris, www.infogm.org.

Silence existe grâce à vous !

Cet article a été initialement publié dans la revue papier. C'est grâce à vos abonnements et à la vente de la revue que nous pouvons continuer à proposer des alternatives à la société consumériste et destructrice actuelle. Sans publicité, sous forme associative, notre indépendance et notre pérennité dépendent de votre engagement humain et financier !

S'abonner Faire un don Participer