La deuxième édition des rencontres À vos bêtes a réuni des élev·euses, des ouvri·ères agricoles et des jeunes plus ou moins engagé·es dans des projets d’installation sur le plateau de Millevaches à l’été 2022. Cette initiative part du constat que de nombreu·ses agriculteu·rices, et notamment des éleveu·ses, vont partir à la retraite ces prochaines années, ce qui va libérer beaucoup de surfaces agricoles.« Si on n’installe que des maraich·ères, ça ne va pas suffire. L’élevage permet de reprendre beaucoup plus de terres à l’agro-industrie », explique Juliette, éleveuse et coorganisatrice des rencontres.
L’objectif du réseau À vos bêtes est de promouvoir un certain type d’élevage, fondé sur des pratiques paysannes soucieuses des milieux de vie et de leurs habitant·es — humains ou non. À l’inverse d’une partie du mouvement écologique qui tend à diaboliser l’élevage, il veut montrer que d’autres formes d’élevage sont non seulement possibles mais également souhaitables. « Oui, il faut manger moins de viande, oui, plein d’élevages sont destructeurs, mais il y a plein de pratiques qui sont bonnes, estime Juliette. De nombreu·ses éleveu·ses et militant·es écolos doivent être allié·es là-dessus face à l’industrie. »
Un rapport écologique au monde
« Si les vaches sont nourries à l’herbe, ça permet de préserver tout un tas de types de milieux comme les tourbières (1) ou les pâturages », explique Juliette. L’élevage paysan a notamment pour intérêt de permettre le maintien d’autres espèces sur les terres utilisées, contrairement à la culture de céréales, par exemple. « Ça incite à découvrir le territoire de manière sensible au vivant, ajoute-t-elle. Tu as une relation de travail, de cohabitation avec tes bêtes. C’est un rapport beaucoup plus dense qu’un rapport uniquement affectif. » À ses yeux, cette activité développe finalement un lien moins hors-sol et bien plus écologique au monde.
Dans le futur, À vos bêtes a pour projet de lancer un compagnonnage qui s’adresserait à « des personnes qui viennent à la fois dans une démarche politique, et parce que ce rapport aux animaux d’élevage leur plaît. » À vos bêtes est convaincu de la nécessité de s’installer en élevage et de propager des pratiques d’élevage vertueuses, mais le réseau est conscient que ce n’est pas suffisant. Son but est aussi de s’organiser pour participer aux actions et les soutenir. « Plein de gens étaient militants et s’arrêtent quand ils s’installent dans leur ferme, regrette Juliette. On réfléchit à des formes d’agriculture qui permettent de continuer un combat politique à côté. S’installer en élevage est un geste politique à la base, mais ça peut l’être encore plus en étant relié à des luttes. »
(1) Zone humide où se forme un sol très concentré en matières organiques.