Chronique Alternatives Bonnes nouvelles de la Terre

Dans la Drôme, on expérimente la « Sécu » de l’alimentation

Enzo Dubesset

Un accès à volonté à des produits bio et locaux conventionnés : c’est l’ambition du projet de « Sécurité sociale de l’alimentation ». Le « marché du lavoir », à Dieulefit (Drôme) s’en est inspiré.

"Le principe est simple. Nous proposons trois prix. Un "prix du maraîcher", qui permet au producteur de couvrir ses coûts et de se payer à un niveau décent, un "prix solidaire" à 125 % de ce prix et un “prix accessible’’ à 65 %", explique Camille Perrin, élue municipale en charge des questions alimentaires.
L’expérimentation s’appuie sur le modèle de la "Sécurité sociale de l’alimentation" (SSA), porté à l’échelle nationale par onze associations. Leur objectif est "d’intégrer l’alimentation dans le régime général de la Sécurité sociale". Une "carte vitale de l’alimentation" donnerait accès à des "produits conventionnés". Le prix des aliments de base (pain, fruits, légumes) comme celui des produits transformés sera payé par la solidarité nationale.
"Aujourd’hui, le marché est presque à l’équilibre, ce qui signifie que les prix solidaires compensent les prix accessibles", se réjouit Camille Perrin. "L’argent gagné au marché est mutualisé dans une caisse. Seule la partie qui correspond au “prix de revient’’ est reversée aux producteurs. Le reste sert à pérenniser les prix accessibles".
Dans le système imaginé par les adeptes de la SSA, le choix et le prix des "produits conventionnés" seraient décidés par "des caisses primaires gérées démocratiquement au niveau local et articulées avec une instance nationale composée de représentants de ses caisses".

Une réponse systémique à des problèmes d’inégalités

"C’est une réponse systémique à des problèmes anciens qui ont été particulièrement visibles ces dernières années, défend Tanguy Martin, ingénieur-agronome et membre du collectif. Par exemple l’aspiration des Gilets jaunes à plus de démocratie directe et à une gestion locale de leurs problèmes du quotidien ou encore le fait que l’aide alimentaire soit devenue une norme et non plus une solution d’urgence." L’aide alimentaire concerne aujourd’hui plus de sept millions de Français·es selon le ministère des Solidarités et de la Santé, contre 3,5 millions en 2010.
Pour les paysan·nes, ce modèle serait aussi synonyme d’un mieux vivre. "Les terres des paysans participant au conventionnement ne feront plus partie de leur capital individuel. Elles appartiendront à la collectivité et ils n’en seront que les tenanciers. Socialiser l’outil de travail permettra de dégager le paysan d’une partie du capital à rembourser et donc de son endettement. La terre deviendra un moyen de production mis en commun, comme l’hôpital dans le service public de santé", dit cet éleveur breton à la retraite.
Les idées commencent à irriguer le débat public. Le Collectif pour la SSA a été contacté par la quasi-totalité du spectre politique et EELV fait même de la SSA une composante de son programme électoral.
Enzo Dubesset

Silence existe grâce à vous !

Cet article a été initialement publié dans la revue papier. C'est grâce à vos abonnements et à la vente de la revue que nous pouvons continuer à proposer des alternatives à la société consumériste et destructrice actuelle. Sans publicité, sous forme associative, notre indépendance et notre pérennité dépendent de votre engagement humain et financier !

S'abonner Faire un don Participer

Disponibilité