Chronique Féminismes L’Écho féministe

Birth strike for future – Les enfants et/ou la planète

Coline Guérin

Au printemps 2018, le mouvement écologique Extinction Rebellion (XR) naît en Angleterre. Dans la foulée, la chanteuse Blythe Pepino, membre de XR et Fridays for future (l’équivalent de Youth for Climate en France) annonce publiquement qu’elle renonce à avoir des enfants pour sauver la planète.

Naissance d’un mouvement de grève des naissances

Galvanisée par l’émergence exponentielle d’XR et des marches pour le climat sur la scène politique occidentale, Pepino crée le mouvement Birth strike for future (Grève des naissances pour le futur) à la fin de l’année 2018. En quelques semaines, des centaines de personnes la rejoignent. Le mouvement se structure rapidement autour d’un site internet et d’une déclaration de principe. La communication est lancée et Pepino enchaîne les interviews dans le monde anglophone. Birth strike for future se fait remarquer lors de ses participations aux actions et marches pour le climat. Ses membres se distinguent par le logo de XR dessiné sur leur ventre et leurs slogans « Right for life », « carbon or kids ? », « where my baby could be ? ». (1)

Un collectif anti nataliste ?

Dans sa déclaration de principe, le collectif se positionne comme soutien aux mouvements de justice climatique prônant un changement de système radical. Même si ses membres ont décidé de ne pas avoir d’enfant pour diminuer leur empreinte carbone, elles et ils ne souhaitent ni convaincre ni juger celles et ceux qui ont des enfants ou voudraient en avoir. En cela, le collectif se positionne contre tout mouvement de régulation des naissances, reconnaissant par ailleurs la portée coloniale et raciste de nombre de ces mouvements. L’objectif principal du groupe semble plutôt être d’informer les individus sur la « sixième extinction mondiale ». Ses membres espèrent ainsi rendre collectif le choix d’avoir des enfants, souvent considéré comme personnel.
Birth strike for future affirme politiser la naissance, mais maintient des positions politiques floues. Ainsi, même si 80 % de ses membres sont des femmes, le mouvement ne se dit ni féministe ni allié à la cause. Enfin, il ne spécifie pas non plus être héritier de mouvements des grèves de naissances écologistes comme il y a pu en avoir par le passé (notamment dans les années 1970 - 1980) en Europe occidentale.

Quid du mouvement aujourd’hui et de ses échos outre-Manche ?

Il semblerait que la grève des naissances anglaise ait eu peu d’échos en France. Même si les débats sur la mise au monde des enfants se popularisent — essentiellement au sein des jeunes (et blancs) mouvements écologistes — aucun groupe ou action sur cette thématique ne s’est encore constitué. Aussi, tout comme XR, le collectif a moins fait parler de lui ces derniers mois. De nombreuses questions restent en suspens. Alors que la peur d’avoir des enfants se développe dans certains milieux (souvent privilégiés), comment contrer l’aspect culpabilisant et individualisant de cette nouvelle moralisation écologique ? Comment mettre en avant l’hyper croissance de notre société plutôt que le nombre d’enfants par personne ?

Coline Guerin

(1) En français, « Droit pour la vie », « carbone ou enfant ? », « où mon bébé pourrait aller ? »

Voir le dossier de Silence, n° 479, juin 2019, « Bébés écolos », notamment l’article « Naître ou ne pas naître : une nouvelle question écolo ? ».
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