Chronique Chronique Désarmons ! Paix et non-violence

Trop tard pour éviter l’apocalypse ?

Patrice Bouveret

Il reste 1 minute et 40 secondes avant que sonnent les 12 coups de minuit qui, pour les scientifiques du « Bulletin of the Atomic Scientists » de l’université de Chicago, symbolisent l’apocalypse. Cette horloge métaphorique a été mise en place en 1947 pour alerter l’opinion publique face au risque de la guerre nucléaire. Sa mise à jour est faite de manière collégiale et intègre les menaces écologiques et technologiques. La fin de la guerre froide et la signature d’un traité de réduction des armes nucléaires par les États-Unis et l’Union soviétique, l’avaient fait reculer jusqu’à 17 minutes avant minuit. Depuis elle n’a eu de cesse de se rapprocher de l’heure fatidique. En 2018 et 2019, l’aiguille avait été placée à 23h58.

Pourquoi la planète a-t-elle perdu 20 précieuses secondes ? « La communauté internationale n’a pas trouvé le moyen d’endiguer les menaces les plus pressantes de l’humanité : les armes nucléaires et le changement climatique », écrivent le groupe d’expert·es, dont 15 Prix Nobel. Les puissances nucléaires ont toutes engagées des programmes de modernisation de leur arsenal, et les quelques accords de contrôle sont remis en cause, comme celui avec l’Iran ou le traité FNI sur les Forces nucléaires à portée intermédiaire… De même à propos du climat, les États sont en recul sur leurs engagements…

Une population peu concernée ?

De quoi être inquiet. Ce que souligne une enquête réalisée fin 2019 par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) auprès de plus de 16 000 personnes de la génération Y (entre 20 et 35 ans) dans 16 pays, dont la moitié sont en guerre, sur leur perception de celle-ci. En effet, l’étude souligne une anxiété importante au sujet des armes nucléaires puisque 54 % des sondé·es sont convaincu·es qu’une attaque nucléaire se produira au cours des dix prochaines années.
Cette enquête mondiale pointe une contradiction également bien présente dans les débats que l’on peut avoir en France : à savoir que si 84 % des sondé·es estiment que l’utilisation des armes nucléaires n’est en aucun cas acceptable et 80 % que leur existence constitue une menace pour l’humanité, ils et elles sont dans le même temps 49 % à penser que les armes nucléaires sont un outil de dissuasion efficace !
Seule petite lueur d’espoir, c’est que trois-quarts des sondé·es pensent que les guerres et conflits peuvent être évités. Là encore, une réponse qu’il faut nuancer dans la mesure où les armes nucléaires viennent en dernier point de leurs préoccupations. En premier figurent les questions économiques : la corruption, le chômage, l’augmentation de la pauvreté…
Or, pour éviter les guerres, il ne faut pas compter sur les dirigeant·es politiques, ni sur les militaires ou les industriels qui en vivent, mais bien justement sur la priorité mise sur cette question dans les différentes mobilisations…

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