Chronique Chronique : Un lieu à soi Femmes, hommes, etc.

A Philadelphie, une maison écologiste au cœur du campus féministe

Constance Rimlinger

Bryn Mawr College, université privée nichée dans une banlieue cossue de Philadelphie, est connue aux États-Unis en tant que membre des « Sept Soeurs », un groupement d’universités féminines créées à la fin du 19e siècle pour promouvoir l’éducation des femmes. C’est l’une des toutes premières universités américaines à avoir délivré des doctorats à ces dernières ; et encore aujourd’hui l’école peut s’enorgueillir d’avoir un pourcentage particulièrement élevé d’étudiantes poursuivant jusqu’en thèse, y compris dans des disciplines encore très masculines telles que les sciences et les mathématiques. Bryn Mawr est également connue pour son magnifique campus verdoyant, conçu dans un style néo-gothique s’inspirant d’Oxford et de Cambridge.

Une petite maison à l’orée d’un bois

Si l’on dépasse les grands bâtiments centraux tout en arcades et en vitraux, qui valent à l’école d’être surnommée « Poudlard » [1], et que l’on s’aventure aux confins du campus, on arrive devant Batten House, une petite maison à l’orée d’un bois. Depuis 1999, il s’agit d’une résidence à part : chaque année une douzaine d’étudiantes, choisies pour leur motivation, peuvent y faire l’expérience d’une forme de vie coopérative centrée sur la sensibilité environnementale. Les élèves s’engagent à adopter des pratiques écologiques – notamment en terme d’alimentation et de recyclage, mais également à sensibiliser le reste de la communauté étudiante, en organisant des repas vegans cuisinés à partir de produits locaux plusieurs fois par mois, ainsi que différents événements et débats autour de questions de justice sociale et de respect de l’environnement. Les décisions sont prises par consensus, et l’entraide est valorisée plutôt que la compétition, omniprésente dans tous les domaines dans notre société. Certaines résidentes résument leur expérience à Batten House en disant qu’elles font le choix de vivre maintenant selon les valeurs qu’elles aimeraient voir dans le monde, plutôt que d’attendre que la société change.

Des habitats créateurs de liens et porteurs de sens

Si cette initiative ne doit pas empêcher de porter un regard critique sur le bilan environnemental global de l’institution et sur son accessibilité, elle ouvre toutefois une piste intéressante : celle de faire entrer les modes de vie engagés là où on ne les attendait pas forcément. Nul besoin d’attendre d’avoir achevé ses études et mis de l’argent de côté, ou d’avoir fait un burn-out et revu radicalement son rapport à la société, pour expérimenter les possibilités d’une façon de vivre plus solidaire et durable. La généralisation de ce type de coopératives dans davantage de campus pourrait peut-être contribuer à la diffusion de valeurs et de pratiques alternatives.
Si l’on tourne maintenant le regard vers la France, qui ne repose pas sur ce système de campus universitaires, on peut voir qu’il y a un engouement d’étudiant·es, mais pas uniquement, pour les éco-colocations. Cet élan invite à penser et expérimenter des habitats créateurs de liens et porteurs de sens.

Chaque mois, retrouvez dans cette chronique un lieu habité dans un esprit féministe

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Notes

[1Pour les Moldu : Poudlard est le nom du pensionnat pour jeunes sorcières et sorciers dans la saga romanesque de J.K.Rowling, Harry Potter

[2Pour les Moldu : Poudlard est le nom du pensionnat pour jeunes sorcières et sorciers dans la saga romanesque de J.K.Rowling, Harry Potter

[3Pour les Moldu : Poudlard est le nom du pensionnat pour jeunes sorcières et sorciers dans la saga romanesque de J.K.Rowling, Harry Potter