Chronique L’action non-violente : mode d’emploi Paix et non-violence

L’enchaînement

Serge Perrin

Les actions non-violentes peuvent se classer en deux catégories :
– celles qui visent à faire connaître sa revendication, à toucher le grand public,
– celles qui visent à faire pression directement sur le lieu du pouvoir (patronat, élu·es, gouvernement).
Bien sûr en pratique la distinction n’est pas aussi nette : convaincre la population à adhérer à notre cause est une manière de faire pression sur le pouvoir (local ou national). Mais choisir l’objectif d’une action est important pour en garder le sens.
L’action de s’enchaîner peut être utilisée pour les deux objectifs : soit sur la place publique pour faire passer un message, soit pour bloquer un lieu, par exemple une usine ou… un abattoir.

Faire connaître son action

Dans les années 1960 à 1980, les jeunes gens qui refusaient le service militaire alors obligatoire étaient souvent emprisonnés, en particulier lorsque le statut d’objecteur de conscience était refusé. Les membres du GARM (Groupe d’action et de résistance à la militarisation) à Lyon avaient pris pour habitude de dénoncer ces emprisonnements en s’enchaînant autour de statues, à l’entrée du siège de l’état-major militaire à Lyon.
Quelques personnes s’accrochent à l’aide d’une chaîne métallique avec un cadenas. Il faut faire attention à ce que la longueur de la chaîne permette de relier les deux points d’amarrage (ou de cercler la statue). Il n’est pas nécessaire d’être très nombreu·ses puisque c’est la chaîne qui fait la longueur. Au contraire d’une « chaîne humaine » où les participant·es se tiennent la main, il est nécessaire de laisser un peu d’espace pour que la chaîne soit visible pour les photos et les passant·es.
Une banderole tenue par les personnes enchaînées explique l’objectif et met en avant le but de l’action.
Et comme toujours dans une action non-violente, des personnes sont autour, non enchaînées, pour distribuer des tracts et discuter avec les passant·es. Ne pas oublier de désigner le ou la responsable des relations avec la police et avec la presse.

Les « anges gardien·nes » ou « Ne perdez pas la clé ! »

Il est nécessaire de prévoir une ou deux personnes chargées du « bien-être » des personnes enchaînées et qui vont distribuer à boire (voire à manger si l’action se prolonge). Ce sont les « peace keeper » en anglais, « ange gardien·nes » en français.
La police qui interviendra aura rapidement les moyens de couper la chaîne avec un coupe-boulon. Pour une action de popularisation, il n’est pas nécessaire de prévoir une chaîne très grosse et coûteuse. Idem pour les cadenas.
Il faut éviter que les clés des cadenas soient portées par les participant·es (elles pourraient être rapidement récupérées par les policier·es) mais, au cas où la police n’intervienne pas, il ne faut pas les jeter non plus (c’est ce qui était arrivé une fois à Lyon !). C’est l’un des rôles des « anges gardien·nes » de porter les clés.
La photo ou le reportage vidéo sur les médias ou sur internet permettent de diffuser le message largement.

Bloquer un lieu

Lorsque l’objectif de l’enchaînement est de bloquer un lieu (de production ou de pouvoir), les enjeux sont différents. L’objectif est alors de durer pour faire une pression directe : empêcher le bon déroulement d’un événement, d’une réunion, d’une manifestation, voire faire perdre de l’argent pour une usine.
Il va falloir utiliser des accessoires capables de résister à une intervention rapide : chaîne et cadenas robustes. Ce sera l’objet d’une prochaine chronique.

Tous les deux mois, Serge Perrin aborde un aspect pratique de l’action non-violente.
Mouvement pour une Alternative Non-violente – Lyon, www.nonviolence.fr

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