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Notre-Dame-des-Landes : une victoire démocratique !

Stephen Kerckhove

Au terme d’un combat vieux d’un demi-siècle, le gouvernement a abandonné le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.

L’heure n’est pas encore à tirer les enseignements de cette lutte déterminée. Il nous est néanmoins possible de mesurer le tremblement de terre entraîné par cet abandon en écoutant l’intensité des cris de quelques élu·es locales.
Dotés d’une légitimité élective de plus en plus incertaine au regard de l’abstention grandissante, certain·es élu·es ont tôt fait de faire main basse sur la démocratie en considérant leur élection par défaut comme un blanc-seing leur permettant d’agir à leur guise. Aux quatre coins du territoire fleurissent ainsi des projets qui, avant d’être décidés pour leur utilité intrinsèque, ne sont que le reflet de la toute-puissance d’élu·es en mal de légitimité.

La fin d’un monopole

Les réactions épidermiques à l’abandon de ce projet d’aéroport montrent et démontrent qu’au-delà d’un projet, c’est bel et bien une façon de faire de la politique qui a été sanctionnée. Et ces élu·es loca·les ne s’y sont pas trompé·es. Ils et elles sentent bien que c’est la fin d’un monde, la fin d’un monopole qu’ils et elles avaient arraché à des citoyen·nes prié·es de se replier dans leur antre privative. L’heure du renouveau démocratique a sans doute sonné et c’est tout un monde fait d’entre-soi et de renvois d’ascenseur qui vacille.
Notre-Dame-des-Landes n’est pas seulement un caprice d’élu·es. C’est la démonstration qu’il n’est désormais plus possible pour certain·es élu·es loca·les de vivre leur mandat comme la continuation, par d’autre moyen, d’une monarchie, fusse-t-elle républicaine.
Et ce n’est pas une consultation départementale organisée pour les besoins de la cause qui peut faire illusion. Les promot·rices de cet aéroport n’ont eu de cesse de rogner le périmètre territorial de la consultation mené en 2016 sur le seul département de Loire-Atlantique afin d’obtenir la caution « démocratique » dont ils et elles avaient besoin pour justifier un projet contesté. Majoritairement hostiles à ce projet d’aéroport, les habitant·es des trois régions du grand ouest n’ont jamais été sollicité·es. Nous devons donc nous réjouir de cet abandon pour ce qu’il est et ce qu’il incarne.

Une victoire historique

L’abandon de Notre-Dame-des-Landes est une victoire historique pour le climat, pour la transition énergétique, pour la préservation des terres agricoles, des zones humides et d’une biodiversité menacée. Cet abandon est également une victoire pour la mobilisation citoyenne, intimement, consubstantiellement, inextricablement liée à l’acte démocratique.
Trente ans durant, certain·es élu·es loca·les se sont vécu·es comme les légataires universelles d’une démocratie malade du désengagement citoyen. À Bure, à Drucat, à Roybon, à Digoin, à Gonesse, partout en France, des citoyen·nes se lèvent pour reprendre ce qui leur est du, la démocratie.
Une bonne nouvelle n’arrive donc jamais seule. L’abandon du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes se double du grand retour des citoyen·nes dans l’enceinte démocratique. Certains élu·es locales avaient pris la mauvaise habitude d’emplir l’espace démocratique laissé vacant. Ils et elles vont devoir désormais partager et ceci est peut être la meilleure nouvelle qui affleure de cette décision d’abandon.

Agir pour l’environnement, 2 rue du Nord, 75018 Paris, www.agirpourlenvironnement.org.

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