La crise écologique affecte prioritairement certaines catégories de la population non-blanches vivant dans des environnements particulièrement précaires. C’est ce que l’on appelle le « racisme environnemental ». Ce livre entend montrer comment « le racisme aggrave la crise écologique ». L’auteur évoque la troublante ressemblance entre la peur du loup et la peur du musulman dans nos sociétés. Il analyse une forme « d’apartheid mondial » qui départage le monde entre zone de confort et « zone sauvage » livrée à l’arbitraire et à la violence. Plutôt que d’inégalités, il préfère parler d’exploitation, car « l’espace civilisé de la légalité et la démocratie est dépendant d’un espace colonial raciste d’accumulation débridée pour son existence, sa subsistance et sa régénération ». Il note que « lorsqu’ils se font prendre, [les migrants] sont de plus en plus souvent enfermés et traités comme des esclaves en fuite ». Pour l’auteur, c’est la domestication généralisée, c’est à dire « un mode d’habitation du monde par la domination dans le but de lui faire produire de la valeur », qui est à l’origine à la fois de la crise écologique, et de la structuration raciste et coloniale du monde. Selon lui, la réponse consiste à mettre en avant d’autres modes d’existence dans le monde, tels que le mutualisme (nous existons les uns par les autres, la vitalité des autres formes de vie enrichit la nôtre) et la réciprocité (vivre toute ponction sur la nature comme un don qui appelle un contre-don pour rétablir l’équilibre). Une réflexion qui reste assez philosophique, mais nourrissante. La passionnante postface de Baptiste Morizot vient prolonger la réflexion.
Trad. Lucie Blanchard, éd. Wildproject, 2017, 144 p., 15 €
Le loup et le musulman. Le racisme est-il une menace écologique ? de Ghassan Hage
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