Numéro 453 - février 2017


Travailler moins, et si on essayait ?

On observe depuis le 19e siècle une tendance générale à la réduction du temps de travail salarié. Pourtant nos sociétés semblent frileuses à aller de l’avant dans cette direction, et pire, certains programmes politiques en vogue voudraient inverser cette évolution. Consommation effrénée contre décroissance choisie, inégalités croissantes contre partage de la richesse, ce sont des choix individuels mais aussi de société qui sont en jeu. A travers des témoignages personnels, des exemples d’entreprises et des analyses de fond, ce dossier explore les voies d’une réduction du temps de travail salarié qui pourrait bénéficier autant aux personnes qu’aux entreprises et à la société dans son ensemble.

Dossier

Travailler moins, et si on essayait ?

Inventerre, une entreprise en bâtiment pas comme les autres

Située en Haute-Garonne, cette société coopérative et participative (SCOP) de huit personnes organise le temps de travail en fonction des besoins collectifs de l’activité mais aussi des besoins individuels.

La réduction du temps de travail n’est pas un long fleuve tranquille

Alors que les gains de productivité et le chômage de masse qu’ils engendrent appellent à aller plus loin dans le partage et la réduction du temps de travail, le débat sur la question pâtit des contrevérités largement répandues sur les 35 heures.

Les 32 heures, c’est possible, et ça se fait même déjà 

Les 32 heures, notamment sous la forme d’une semaine de quatre jours, peuvent apparaître comme une innovation sociale allant plus loin que les 35 heures, pourtant largement remises en question. En réalité, elles ont déjà fait l’objet d’une loi par le passé, et de grandes entreprises les ont adoptées.

Ailleurs en Europe

Un petit tour chez nos voisins européens tord le cou aux idées reçues et montre que la réduction du temps de travail est plus que jamais d’actualité.

Articles

 
L’Europe du nord lance des voies cyclables rapides interurbaines

Le vélo électrique permet de parcourir des distances de plusieurs dizaines de kilomètres. De là l’idée d’offrir des pistes cyclables rapides en périphérie des grandes villes.

La construction en terre entravée par les lobbies du ciment

En Isère, le Domaine de la terre est un quartier d’habitat social unique en France. Les 70 logements y sont construits en terre crue, une ressource naturelle et locale, recyclable et non polluante.

 
Ile d’Oléron : Un restaurant zéro déchet

Le restaurant De l’île aux papilles a vu le jour en février 2016 sur l’île d’Oléron (Charente-Maritime). Sébastien Riandière et Sarah Aubin ont décidé de favoriser les aliments locaux… et de tenter d’aller vers le zéro déchet.

 
Adama Traoré, tué par les gendarmes

Le 19 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise (Val d’Oise), Adama Traoré, 24 ans, en pleine santé, décède alors qu’il est entre les mains de la gendarmerie. La famille d’Adama se bat pour que la justice et la vérité soient faites sur ce drame.

La Calebasse, quels choix technologiques pour rester autonomes ?

La Calebasse, groupement d’achat local du Gard, a remis en question certains de ses outils informatiques et privilégie le lien plutôt que l’efficacité technologique.

 
Saliou et l’Arbre à poule

Il était une fois la rencontre entre Saliou, jeune migrant de 20 ans en demande d’asile, et l’équipe de l’Arbre à poule, ferme pédagogique et agroécologique de Villers-Saint-Paul, dans l’Oise…

 
En Crête, antimilitarisme et accueil des réfugié-es

La base militaire états-unienne de Souda, en Crête, est un lieu idéalement placé pour des interventions en Libye, en Syrie, etc. Les armées du monde entier y envoient des militaires dans le cadre de l’OTAN. Mais le collectif Kanaima s’insurge…

Revenir sur nos pas,
Zone d’exclusion de Fukushima

Depuis mars 2011, Carlos Ayesta et Guillaume Bression se sont rendus à de nombreuses reprises dans la région de Fukushima et dans le no man’s land qui entoure le site accidenté.

Chroniques

Bonnes nouvelles de la Terre
L’île danoise de Samsø apprend à vivre sans pétrole

En direct de nos colonies
Que cache le réendettement du Congo-Brazzaville ?

Nucléaire ça boum !
La France se démène !

L’écologie, c’est la santé
La chasse au Centre International de Recherche sur le Cancer est ouverte !

Catastrophe de Fukushima
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100 dates féministes pour aujourd’hui
1791 : Tricoteuses révolutionnaires

Brèves 

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Éditorial

Le temps de vivre

L’année 2016 aura été marquée par les luttes sociales contre la loi Travail en France. Pourtant, 2016 était aussi la date anniversaire des 80 ans du Front populaire, des premiers congés payés. Si l’on remonte au 19e siècle, on observe une tendance inéluctable à la réduction du temps de travail salarié, allant de pair avec l’augmentation de la productivité. C’est une tendance partagée partout en Europe. La remise en cause de la réduction du temps de travail représente un recul historique. 

Il convient de préciser que nous parlons ici du travail salarié (1), exercé sous l’autorité d’un employeur, encadré par une législation que les contrats doivent respecter. Pour être plus précis, on devrait d’ailleurs parler d’emploi, car le travail pourrait être entendu comme toute activité au sens large, sans qu’elle fasse nécessairement l’objet d’une rémunération sociale ou personnelle. Par exemple, nettoyer une rue, garder des enfants, repeindre un appartement, aider une voisine à faire ses courses : emploi, travail ou activité ? Ce sont les notions de lien de subordination et de salariat qui font la différence, mais pas le contenu même de l’action. Ce qui est alors intéressant quand on élargit sa vision, c’est de mesurer à quel point, même si l’emploi diminue, le travail ne manque pas… Et dans tout ça, quand est-ce qu’on respire 

Dans ce dossier, nous avons souhaité remettre ce sujet en discussion, partant du constat que la réduction du temps de travail de manière choisie pouvait être un levier puissant pour construire une société décroissante, parce qu’elle pose inéluctablement la question de la consommation (quoi, combien ?), la relation de soi au reste du monde (qu’est-ce que je donne, qu’est-ce que je reçois ?), et finalement du sens (pourquoi ?). Nous proposons pour cela de questionner les représentations, analyser les statistiques, écouter les parcours des gens, observer les expériences européennes, relire les philosophes.

Léa Till

(1) Le salariat concerne 91 % de l’emploi en France (source : INSEE).