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Chères abeilles, la ruche horizontale est faite pour vous

Jonas Lum

Depuis six ans, Pierre se passionne pour un modèle de ruche peu onéreux à construire soi-même. Prosélyte, il essaime ses conseils pour aider à sa diffusion. Un moyen de lutter contre la disparition des abeilles et l’importation de miel de mauvaise qualité.

« C’est bien mignon ton truc, mais est-ce que ça marche au moins ? » Cette phrase, Pierre l’a entendue à plus d’une occasion. Presque chaque fois qu’il présente son modèle de ruche horizontale en palettes. Il faut dire que cette grosse caisse, aux allures de sarcophage sur pattes et construite avec du bois de récupération, ne ressemble en rien à celles que l’on a l’habitude de voir. Et c’est justement pour cela que Pierre s’y est intéressé.
Contrairement aux ruches classiques, la ruche horizontale ne nécessite pas de cadre ni de cire gaufrée. Les abeilles construisent elles-mêmes leurs rayons, comme elles le feraient dans la nature. Elles n’ont pas non plus de taille standard, même si la plupart font un bon mètre de long. Elles sont également équipées d’une vitre latérale, qui permet d’observer la colonie sans la déranger. La conduite de la ruche est réputée facile et, pour la récolte, pas besoin d’outillage : exit, donc, le coûteux matériel d’extraction. C’est pour ces raisons qu’une université canadienne a développé un modèle de ruche horizontale pour les agriculteurs kényans désargentés dans les années 1970, en s’inspirant des ruches horizontales grecques, vieilles d’au moins 2000 ans. Ce qui vaut aujourd’hui à la ruche horizontale le surnom de ruche kényane.

Un habitat proche de celui qu’ont les abeilles à l’état sauvage

Pierre prévient d’emblée : « Si vous voulez faire de la production, ce n’est pas ça qu’il vous faut. Vous récolterez quelques kilos par an, et encore, pas la première année ». Mais ce n’est pas ce qui l’intéressait. Il voulait avant tout aider les abeilles, dont la population se réduit de manière inquiétante, en leur offrant un habitat proche de celui qu’elles ont à l’état sauvage. Et il a choisi de la construire en palettes pour encourager la récupération. Il précise que les palettes ne sont pas traitées chimiquement.
À partir des infos trouvées sur Internet, Pierre construit sa première ruche horizontale il y a six ans. Conquis, il poursuit ses recherches et crée un site Internet afin d’en partager les fruits. Depuis, il passe une bonne partie de ses week-ends et de ses vacances en déplacement pour animer des ateliers autour de sa passion.
Certes, mettre une ruche au fond de chaque jardin, comme le souhaiterait Pierre, ne suffira pas à faire changer les pratiques des industriels de l’agriculture, mais offrira aux abeilles de meilleures chances de survie. Et contribuera à régler une autre aberration : « La France importe 50 % de son miel, déclare Pierre. Il faudrait un million de ruches pour pourvoir à notre consommation, ou deux millions de ruches horizontales, car elles sont environ deux fois moins productives que les ruches classiques ! » Nous sommes encore loin du compte. Surtout que « la ruche en palette, c’est du boulot et il faut être un peu bricoleur », concède-t-il. Il a donc conçu un autre modèle, un peu plus cher, mais plus facile à réaliser, baptisé Brico Costo, que « tu peux monter avec une scie à main et un tournevis ».

Jonas Lum

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