Brève Alternatives Chronique de Reporterre

Un grand restaurant parisien ne se fournit qu’en produits d’Ile-de-France

Lorsqu’on déjeune au restaurant Terroir parisien, place de la Bourse à Paris, on constate que relocalisation et gastronomie peuvent aller de pair.

« Dans chaque plat, la quasi-totalité des produits provient de la région parisienne », explique la serveuse en apportant l’entrée. La carte propose un semainier des producteurs d’Île-de-France. Au programme : lundi, agneau Champvallon de chez Morisseau (un éleveur d’Aufferville, en Seine-et-Marne), etc.

Patrimoine gastronomique en danger

« J’ai pensé qu’il fallait redonner un sens et une direction à la cuisine parisienne en faisant redécouvrir des produits endémiques, c’est-à-dire originaires d’Île-de-France », explique Yannick Alléno.
Alexandre Drouard et Samuel Nahon, deux passionnés de gastronomie, qui ont créé Terroirs d’avenir pour approvisionner en produits frais les tables parisiennes, l’aident à recenser quelque 150 produits qui ont fait l’histoire de la gastronomie parisienne. Les trois hommes partent à leur recherche. « Là, je me suis franchement alarmé ! Il ne restait plus que 34 ou 35 produits endémiques, les haricots blancs de Pompadour, l’asperge d’Argenteuil ou la cerise de Montmorency. Mais la figue blanche de Paris et de nombreux autres fruits et légumes avaient disparu. » Quant au chou de Pontoise, au cresson de Méréville ou à l’asperge d’Argenteuil, que la famille Berrurier était la dernière à cultiver à Neuville-sur-Oise, ils s’apprêtaient à connaître le même sort pour des raisons économiques.

Au secours de l’asperge et de la poire de terre

Cette perspective est insupportable au chef cuisinier. « La disparition de l’asperge d’Argenteuil aurait été une catastrophe ! Il faut que les gens sachent que l’agriculture industrielle fabrique des asperges à partir de greffons modifiés et qu’il faut cinq ans pour produire une espèce d’asperge endémique, en accouplant des graines mâles et femelles. Alors, je suis allé voir les Berrurier et leur ai garanti que j’achèterai toute leur production. »
« Nous avons aussi réintroduit la carotte ronde de Paris, la coulemelle de Courances et la poire de terre, remise en culture par Laurent Berrurier dans le Val d’Oise. Cuite ouverte en deux au four en papillote, avec un peu de réglisse, cette poire est magnifique  ! »
En mars 2012, Yannick Alléno ouvre le premier Terroir parisien dans le cinquième arrondissement de Paris, à la Maison de la Mutualité, puis en novembre 2013, celui du Palais Brongniart, dans le deuxième arrondissement.

Un mouvement qui fait tache d’huile

Plus de 150 produits d’Île-de-France sont à leur carte. « On redécouvre la capacité d’autosuffisance que pourrait avoir l’Île-de-France. Il ne faut pas oublier que Montreuil a été l’un des garde-manger les plus fournis de Paris ! »
Le mouvement fait tache d’huile. « Nous n’avons jamais gardé un produit pour nous. Il faut voir Terroir parisien comme un mouvement culinaire et non pas comme une adresse de restaurant et je me félicite que 110 ou 120 chefs référents dans Paris aient adopté ses produits. »

Philippe Desfilhes (Reporterre)

• Terroir Parisien, Palais Brongniart, 28, place de la Bourse, 75002 Paris, tél : 01 83 92 20 30.
• Terroir Parisien, 20, rue Saint-Victor, 75005 Paris, tél : 01 44 31 54 54.

Note de la rédaction de Silence : à côté de ces deux restaurants branchés terroir, Yannick Alléno a ouvert 15 autres restaurant à Courchevel, Saint-Tropez, Dubaï, Marrakech, Pékin… Rien de local cette fois-ci !

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