Brève Chronique Alternatives Monde en construction(s)

Eco-hameau de la baie, de la paille à la résilience

Chloé Deleforge

Pour notre premier reportage sur le sol nord-américain, nous avons rendez-vous avec les habitants du éco-hameau de la baie au Québec. Depuis 25 ans ils explorent des solutions pour réduire leur dépendance aux énergies fossiles !
Pierre Gilbert, l’un des fondateurs, nous raconte : "En 1972, le Club de Rome a démontré les limites de notre société fondée sur une croissance infinie dans un monde aux ressources finies. On ne savait pas si les ressources s’épuiseraient dans 20 ou 300 ans… Mais c’était inadmissible pour nous d’avoir construit un système non viable à long terme". C’est pourquoi, avec d’autres, il décide de fonder un éco-hameau et le Groupe de Recherche Ecologique de la Baie (GREB).
En 1996, quand Patrick Déry et Martin Simard construisent une des premières maisons en ballots de paille du hameau, la lenteur du processus les pousse à innover. Ils ont l’idée de monter une double ossature en bois, d’y compresser les ballots, puis de couler un mortier (composé de sable, sciure de bois, chaux et de 8% de ciment) à l’aide d’un coffrage. La technique du GREB est née.
La dernière maison du hameau d’une superficie d’environ 150m2 a été auto-construite en 9 mois (dont 3 semaines pour le remplissage de l’ossature bois avec les ballots) pour un coût total de 100 000 €. Depuis son invention, la rapidité et la facilité de cette technique a convaincu des auto-constructeurs au Canada, en France, au Maroc, au Chili, en Ukraine...
Aujourd’hui tout le monde semble s’intéresser au sort de la planète y compris les multinationales qui n’auraient manqué le coup de pub de la COP21 pour rien au monde... Pourtant Patrick regrette l’utilisation abusive et erronée de l’adjectif « écologique » à tout-va, notamment dans le secteur de la construction : "Au Québec, on se soucie essentiellement de la consommation énergétique de la maison quand elle est habitée. Mais on ne tient pas compte de l’énergie dépensée pour la construction et la destruction. D’où viennent les matériaux ? Comment ont-ils été extraits ? Ont-ils nécessité d’importantes transformations ? C’est le bilan écologique global qu’il faut prendre en compte, du berceau au tombeau ." Pierre ajoute "On ne propose pas nécessairement que tout le monde construise en paille. Il se peut qu’ailleurs le plus écologique soit de construire avec d’autres matériaux ou d’augmenter la densité d’occupation des logements déjà existants, de mieux les isoler…"
Au-delà des préjugés qui commencent à tomber, l’absence d’un potentiel économique au niveau industriel freine le développement de la construction paille. Pourtant, grâce à un travail titanesque et souvent bénévole, des avancées ont lieu. En 2012, Le Réseau Français de la Construction Paille a publié "les règles professionnelles de la construction en paille". Cet ouvrage reconnu par les autorités publiques permet désormais aux professionnels d’utiliser les bottes de paille et d’être assurés ! Les membres du GREB espèrent que le Canada suivra cette dynamique...

Chloé Deleforge et Olivier Mitsieno

Pour en savoir plus sur le GREB et les autres initiatives que nous filmons, rendez-vous sur notre site www.eco-logis.org à la rubrique « carnet de route » et sur facebook : ecologis.project

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