Brève Chronique Armes nucléaires Paix et non-violence

Nouvelles internationales

Dominique Lalanne

Alors que l’ONU vient de décider la création d’un groupe de travail en vue de proposer, en 2016, un processus aboutissant à un traité d’interdiction des armes nucléaires, la France s’obstine à lutter contre un tel objectif, et se réfugie dans une attitude incohérente qui paralyse toute possibilité de réel progrès dans le désarmement.

« La France, reste résolument engagée en faveur du désarmement nucléaire » a rappelé notre ambassadrice du « désarmement » à l’ONU. Dans les faits, sa position est bien plus ambiguë. La France se présente toujours en modèle du désarmement nucléaire avec, par exemple sa doctrine dite de « stricte suffisance » reposant sur 300 bombes (mais pourquoi pas 150 ?), sa ratification du traité d’interdiction des essais nucléaires (mais elle en « expérimente » au Mégajoule ou à Valduc, près de Dijon), sa proposition d’un traité d’interdiction de production de matière fissile (mais elle ne remet pas en cause les quelques dizaines de tonnes qu’elle possède…).

Plus grave encore est l’absence de débats en France sur la dissuasion nucléaire elle-même. Lors d’un colloque à l’Assemblée nationale le 26 octobre 2015, sur le sujet précis de la dissuasion, le leurre de la dissuasion nucléaire n’a pas été évoqué. Pour tous nos responsables politiques la dissuasion nucléaire ne peut pas être remise en cause ! Une seule question taraude cependant quelques militaires : n’est-il pas temps de faire décroître le budget du nucléaire, vu les limites du budget de la Défense.

Dommage… car sous d’autres formes la dissuasion peut être une stratégie efficace pour éviter des conflits armés : par exemple les dissuasions financière, industrielle, énergétique… et non-violentes, sont de loin les plus efficaces !

La France s’oppose à la majorité des pays qui veulent un processus d’interdiction des armes nucléaires comme cela vient d’être voté à l’ONU. Or, si la France souhaitait réellement parvenir à un « monde sans armes nucléaires », elle aurait tout intérêt à s’impliquer dans le processus actuel vers un traité international d’interdiction des armes nucléaires. Cela lui permettrait beaucoup plus facilement de convaincre les autres États nucléaires de réduire leurs arsenaux de façon à pouvoir négocier un désarmement nucléaire total et contrôlé, avant qu’il ne soit trop tard ! Le processus qu’elle défend, dit « pas à pas », a déjà fait largement la preuve de sa grande inefficacité. Un tel processus ne permettra jamais d’avancer vers un monde sans armes nucléaires !

Une telle obstination française contre le désarmement nucléaire conduit à une incohérence grave et donc à un blocage, alors que la vocation historique de la France, pays des droits de l’Homme, serait de prendre le leadership du désarmement nucléaire mondial, assumant ainsi un rôle qui laisserait une trace majeure dans l’Histoire.

Dominique Lalanne
Extraits de l’édito de Armes nucléaires STOP, novembre 2015

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