Chronique Fukushima Nucléaire

Cauchemar de Fukushima est aussi le nôtre

Monique Douillet

Dans le dernier numéro, nous indiquions que le 22 septembre le record de contamination d’eau souterraine était monté à 790 000 Bq/L. Un prélèvement effectué le 17 octobre enregistre 5,1 millions de Bq/L.
Quant à la nouvelle ministre de l’économie et de l’industrie nommée le mois dernier, elle vient de démissionner ! Non à cause de l’énormité de ses mensonges, mais en raison de son utilisation litigieuse de l’argent public. C’est ainsi que dans la journée du 21 octobre la ministre démissionnaire, Yuko Obuchi, fille d’un ancien premier ministre a été remplacée par Yoichi Miyazawa, neveu d’un ancien premier ministre ! Nous constatons que "la situation est globalement sous contrôle".

Ce qui l’est moins, c’est la lutte titanesque, mais peu efficace jusqu’à ce jour, menée par TEPCO à Fukushima. L’entreprise qui avait engagé une course contre la montre pour colmater tant bien que mal les failles, arrêter le déversement en mer, pomper les eaux de refroidissement... constate trois ans et demi après que la pollution a progressé dans les cours d’eau, les précipitations atmosphériques, les nappes souterraines et contamine gravement l’océan.

Pourtant tout ce qui est imaginable a été fait :
* Ensevelir les réacteurs sous le béton, peine perdue, ça n’arrête pas les réactions nucléaires.
* Pomper l’eau contaminée et la stocker : TEPCO voudrait atteindre une capacité de stockage de 700 000 m3 d’ici à 2015, mais ne sait plus où installer les cuves. D’autre part, on découvre sans cesse de nouvelles fuites.
* Diluer ces eaux avant de les rejeter en mer. (ce qui ne change rien à la quantité de radioactivité relâchée.) Les tests ayant montré que l’eau pompée était 1000 fois trop radioactive, il faut 1000 litres d’eau de mer pour diluer un litre d’eau souterraine !
* Congeler les eaux les plus fortement polluées pour les retenir (combien de temps ?) Malgré l’injection de 400 tonnes de glace carbonique en 3 mois pour construire un mur de glace, l’eau réchauffée par la proximité des réacteurs n’a jamais gelé, mais les tuyaux, eux, si. L’autorité de sûreté a exigé de mettre fin à cette opération aussi ruineuse qu’inutile et de reprendre la recherche.
* Traiter les eaux. Dernière invention, la chaîne "ALPS" permet l’extraction du césium et du strontium. (Les autres éléments radioactifs restent présents.) Cette chaîne traite actuellement 300 m3 par jour. Une nouvelle unité lui sera ajoutée. La compagnie s’est engagée à "purifier" toute l’eau accumulée d’ici au 31 mars 2015, fin de l’année fiscale. Qualifier de purifiée l’eau passée dans les filtres à césium et strontium est du même niveau qu’affirmer que la situation est « sous-contrôle ».
Pendant ce temps, 300 à 400 m3 d’eau qui refroidissent les réacteurs pénètrent quotidiennement dans les sous-sols, s’ajoutant au stock à traiter...
Comment ne pas penser aux Shadoks ? (2)

Monique Douillet

(1) TEPCO : Tokyo Electric Power Company, compagnie gestionnaire entre autres de la centrale de Fukushima.
(2) Les Shadoks, célèbre série télévisée d’animation en 208 épisodes de 2 à 3 minutes (première diffusion le 29 avril 1968). “Les Shadoks pompaient, pompaient et pompaient encore“…jusqu’à l’absurde.

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