Chronique L’écologie c’est la santé Santé

2019 : sale temps pour le glyphosate !

François Veillerette

Le glyphosate, l’herbicide le plus vendu au monde, a fait couler beaucoup d’encre en 2017 et 2018. Autorisé ou interdit en Europe ? Le suspens avait été entier jusqu’à la fin décembre 2017 pour finalement déboucher sur une demi mesure de réautorisation pour 5 ans, au lieu des 10 prévus.
En 2018 c’est l’interdiction de l’utilisation du glyphosate dans les 3 ans qui a été décidée – mais pas votée – en France.
Il semble bien que 2019 sera encore une année où l’on parlera beaucoup de cet herbicide. En effet, le 15 janvier dernier trois évènements importants ont eu lieu.

Industriels et universitaires ne trouvent pas les mêmes résultats

Tout d’abord ce fut la médiatisation par le quotidien Le Monde (1) d’une étude étasunienne comparant les études des industriels sur le glyphosate et celles des universitaires. Les résultats de cette étude sur la génotoxicité du glyphosate sont révélateurs. Ils montrent qu’une seule des 52 études examinées par l’Agence américaine de protection de l’environnement, soit 2 %, indique une génotoxicité du produit. À l’inverse, 67 % des études universitaires publiées montrent une génotoxicité du glyphosate. Or on sait qu’au niveau politique les personnes qui évaluent prennent en compte quasi exclusivement les études fournies par les firmes industrielles…

Et c’est justement un nouveau rapport publié à la demande de parlementaires européen·nes, qui a été rendu public le même jour, qui montre comment les études universitaires sont écartées du dossier d’homologation du glyphosate ! Le spécialiste du plagiat Stefan Weber et le biochimiste Helmut Burtscher de l’ONG autrichienne Global 2000 ont examiné la partie étudiant la toxicité du glyphosate pour l’homme dans le rapport réalisé par l’Agence allemande Bfr pour l’Union européenne. Dans ce rapport l’évaluation des études universitaires était, pour 50% de son contenu, un plagiat pur et simple du dossier fourni par Monsanto ! Pas étonnant dans ces conditions que les études universitaires présentées soient jugées non fiables par le rapport allemand. Ce même rapport a servi de base à la décision de la Commission pour soutenir une ré-homologation de la molécule. Sans commentaire…

Les dérives du système d’évaluation des pesticides

Enfin le même jour que la publication de ce rapport on apprenait que, saisi par le Comité de Recherche et d’Information Indépendantes sur le Génie Génétique (CRIIGEN), le tribunal administratif de Lyon avait annulé (2) la décision du 6 mars 2017 autorisant la mise sur le marché du Roundup Pro 360 (herbicide à base de glyphosate), par un jugement pris en application du principe de précaution. Ce jugement constituait une magnifique victoire, surtout parce que le juge administratif avait pris en compte… les données des études universitaires étudiées par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) basé à Lyon.

On le voit, ce dossier du glyphosate n’en finit pas de nous montrer par le détail quelles sont les dérives du système d’évaluation des pesticides en Europe. Le Parlement européen a adopté le 16 janvier dernier un rapport proposant des pistes de réformes intéressantes (3). Souhaitons que la Commission européenne les suive !

François Veillerette

(1) « Glyphosate : pourquoi la cacophonie persiste sur l’herbicide controversé », Le Monde, 15 janvier 2019.
(2) http://lyon.tribunal-administratif.fr, décision n°1704067.
(3) « Glyphosate : la bataille politique européenne se poursuit », Libération, 16 janvier 2019.

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