Brève Chronique Armes nucléaires Paix et non-violence

Pape François s’oppose à l’arme nucléaire

Isabelle Cambourakis

En novembre 2015, Silence a publié une grande affiche couleur intitulée « 100 dates qui construisent nos luttes féministes aujourd’hui ». Chaque mois, cette chronique permet de revisiter une date du féminisme.

Le 16 avril 1969 elles sont onze femmes à pénétrer dans les bureaux de la United Fruit Company à Washington avec des chaudrons et des tambours pour dénoncer la politique impérialiste états-unienne et les accointances entre L’United Fruit et la CIA dans le renversement du gouvernement au Guatemala. « United Fruit collecte son butin / En volant les pauvres qui récoltent ses fruits / Bananes et fusils ; sucre et mort / Guerre pour le profit ; souffle de tarentules », chantent-elles lors de cette action. Les femmes qui participent à ce chahut appartiennent au collectif WITCH qui vient juste de se créer à New York au cours de l’année 1968. WITCH est un acronyme qui bien sûr veut dire Sorcière mais aussi Women’s International Terrorist Conspiracy from Hell (Conspiration terroriste internationale des femmes venues de l’enfer) ou Women Inspired to Tell their Collective History (Femmes inspirées pour raconter leur histoire collective). Commettre l’histoire du point de vue des femmes en commençant par se réapproprier la figure de la sorcière et en dénonçant les chasses aux sorcières de la Renaissance était un des objectifs de ce collectif d’agitatrices qui, à la réflexion théorique, préféraient l’agit-prop, le théâtre de guérilla urbaine, les actions visibles et symboliques dans l’espace public.

Vos armes ? Théâtre, musique, magie

Nés à New York, les collectifs WITCH se répandent bientôt dans de nombreuses villes aux Etats-unis, écrivent des pamphlets où l’on peut lire « WITCH, c’est le théâtre, la révolution, la magie, la terreur, la joie, les fleurs d’ail, les charmes. C’est la conscience que les sorcières et les gypsies furent les premièr-e-s combattant-e-s des guérillas et de la résistance contre l’oppression, en particulier l’oppression des femmes à travers les siècles (…) Vos armes ? Théâtre, satire, explosions, magie, herbes, musique, costumes, caméras, chants, masques, affiches, peinture, pochoirs, films, tambourins, briques, balais, poupées vaudou, chats, chandelles, cloches, craie, ongles, grenades à main, bagues à poison, magnétophones, fusibles, encens - toute votre magnifique imagination sans limite ». Petits groupes spontanés et subversifs, leurs actions donnent l’image d’une effervescence poético-politique, joyeuse et radicale, qui a largement inspiré les années 70 et 80. Si ces collectifs se sont rapidement dissous dans le bouillonnement militant de ces années, on retrouve en de nombreux endroits du globe des femmes qui se réapproprient cette figure. Dans les années 1980, des femmes des mouvements éco-féministes anglo-saxons se revendiquent sorcières à leur tour en dénonçant la double appropriation par le capitalisme et le patriarcat de la nature et du corps des femmes. A l’heure des luttes nécessaires contre le réchauffement climatique, contre l’extractivisme et la disparition des espèces, nous avons sans doute besoin de « toute la magnifique imagination sans limite » des sorcières.

Isabelle Cambourakis

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